#Cambodge : fausse démocratie, vraie tyrannie : un dossier à lire !

Cambodge : fausse démocratie, vraie tyrannie

La dérive autoritaire du Cambodge est l’un des exemples les plus frappants, sinon le plus frappant, de l’évolution de la majorité des pays de l’Asie du Sud-Est vers l’« illibéralisme ». Depuis longtemps, on savait que le royaume cambodgien n’était qu’une démocratie de façade. Un régime quasi autoritaire placé depuis des lustres sous la férule du premier ministre à poigne Hun Sen, ancien Khmer rouge reconverti depuis les années 1990 aux bienfaits de la démocratie libérale – système dont il a su tirer à merveille les avantages.
Désormais, la façade déjà lézardée s’est écroulée et révèle la vraie structure de la maison khmère : une fausse démocratie et une vraie tyrannie, où un Parlement croupion et des élections sans réelle opposition servent de faire-valoir. L’économie est phagocytée par la famille de Hun Sen, au pouvoir depuis trente-trois ans – et qui a bien l’intention de s’y accrocher, jusqu’à ce que mort s’ensuive.

Hun Sen est désormais plus que jamais déterminé à ne pas quitter le pouvoir, qu’il veut sans partage. Une inclination qui n’est pas nouvelle. Dans ses passionnants Mémoires, La diplomatie n’est pas un dîner de gala(éd. L’Aube, 2018), le diplomate Claude Martin, ancien responsable de l’Asie au Quai d’Orsay, ex-ambassadeur de France en Chine et en Allemagne, rapporte un entretien privé qu’il a eu en 1990 à Phnom Penh avec celui qui était déjà le premier ministre du Cambodge.
« Vous voulez démanteler mon gouvernement ? », lança Hun Sen à Claude Martin, à l’approche de l’accord de Paris, qui conduirait, un an plus tard, à la mise sous tutelle du pays sous l’égide des Nation unies jusqu’à l’organisation d’élections (tout en laissant, en réalité, le pouvoir à Hun Sen). « Le propos [de Hun Sen] m’inquiéta, écrit l’ancien diplomate. Le chef du “Kampuchéa populaire” [appellation d’alors du Cambodge] allait tout faire, je le sentais, pour garder le pouvoir. » C’est exactement ce qu’il s’est passé.

Le premier ministre cambodgien, Hun Sen, lors d’un discours aux ouvriers d’une manufacture de textile, dans la province de Kandal, le 30 mai 2018.

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